Rapport annuel du ministre de la Sécurité publique concernant les engagements assortis de conditions : arrestations effectuées sans mandat
15 juillet 2013 - 14 juillet 2014
1. Introduction
En vertu des paragraphes 83.31(3) et (3.1) du Code criminel, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile doit préparer et déposer un rapport annuel au Parlement sur l’application de l’article 83.3 du Code criminel, qui porte sur les engagements assortis de conditions. Le rapport doit comprendre :
- Le nombre d’arrestations effectuées sans mandat au titre du paragraphe 83.3(4) et la durée de la détention de la personne dans chacun des cas;
- Le nombre de cas d’arrestation sans mandat au titre du paragraphe 83.3(4) et de mise en liberté :
- par un agent de la paix en vertu de l’alinéa 83.3(5)b) ;
- par un juge en vertu de l’alinéa 83.3 (7)a).
- L’opinion du ministre de la Sécurité publique quant à la nécessité de proroger l’article 83.3 et la motive.
Le ministre responsable des services de police de chaque province doit également publier, ou mettre à la disposition du public de toute autre façon, un rapport annuel sur l’application de cette disposition. Les rapports provinciaux ne sont pas inclus dans le présent document Note de bas de page 1.
Créée à l’origine dans le Code criminel par la Loi antiterroriste en 2001, la disposition relative à l’engagement assorti de conditions (de même que la disposition relative à l’audience d’investigation) était visée par une clause de temporisation de cinq ans selon laquelle la mesure cesserait de s’appliquer à la fin du quinzième jour de séance du Parlement après le 31 décembre 2006, à moins qu’une résolution visant à proroger la disposition soit adoptée par les deux Chambres du Parlement. En février 2007, la Chambre des communes a voté contre la prorogation de ces dispositions. Par conséquent, elles ont cessé de s’appliquer le 1er mars 2007. Toutefois, ces dispositions ont été renouvelées accompagnées de mesures de protection supplémentaires quand la Loi sur la lutte contre le terrorisme est entrée en vigueur le 15 juillet 2013.
Ce document est le rapport annuel du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. Il couvre une période de retour de l’application de l’article 83.3 du 15 juillet 2013 au 14 juillet 2014, pendant laquelle cette mesure était prévue dans le Code criminel.
2. La Loi antiterroriste et les engagements assortis de conditions
Au lendemain des attentats terroristes du 11 septembre 2001 aux États-Unis, le Canada n’a pas tardé à mettre en place une approche complète pour lutter contre le terrorisme. Un des éléments clés de cette approche était l’adoption du projet de loi C-36, le 15 octobre 2001. La Loi antiterroriste a reçu la sanction royale le 18 décembre 2001.
La Loi antiterroriste traitait des objectifs de l’approche du Canada quant à la lutte contre le terrorisme, notamment empêcher les terroristes d’entrer au Canada, protéger les Canadiens contre les actes de terrorisme en mettant en application des outils permettant d’identifier, de poursuivre en justice, de condamner et de punir les terroristes et de collaborer avec la communauté internationale pour traduire les terroristes en justice et s’attaquer aux motivations du terrorisme. La Loi a permis de modifier de nombreuses lois fédérales et d’introduire plusieurs nouvelles mesures de lutte contre le terrorisme dans le Code criminel.
4. Disposition relative à l'engagement assorti de conditions
L’article 83.3 du Code criminel établit une mesure pour interrompre des plans d’exécution d’une activité terroriste. Un agent de la paix qui a des motifs raisonnables de croire qu’une activité terroriste sera entreprise et de soupçonner que l’imposition de conditions pour la supervision ou l’arrestation d’une personne est nécessaire pour éviter que l’activité terroriste ne soit entreprise peut faire une dénonciation devant un juge de la cour provinciale. Le juge peut ensuite faire comparaître la personne devant lui. Dans un nombre limité de situations, l’agent de la paix, s’il a des motifs raisonnables de soupçonner que la mise sous garde de la personne était nécessaire afin de l’empêcher de mettre à exécution une activité terroriste, peut, sans mandat, arrêter la personne en vue de la conduire devant un juge. Le juge peut, s’il est convaincu, par la preuve apportée, que les soupçons de l’agent de la paix sont fondés sur des motifs raisonnables, ordonner que la personne contracte l’engagement de ne pas troubler l’ordre public et de se conformer aux autres conditions raisonnables que le juge estime souhaitables pour prévenir la perpétration d’une activité terroriste. L’engagement sera contracté pour une durée maximale de douze mois.
Les dispositions relatives à l’engagement assorti de conditions prévoyaient notamment les mesures de protection suivantes :
- L’agent de la paix peut déposer la dénonciation devant un juge de la cour provinciale seulement s’il a obtenu le consentement préalable du procureur général du Canada ou de son substitut légitime, ou du procureur général d’une province ou du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile ou de son substitut légitime.
- Le fait d’exiger que la personne ait des motifs raisonnables de croire qu’un acte terroriste sera commis donne de l’objectivité au critère. Autrement dit, le critère n’exige pas uniquement un doute raisonnable.
- Seul le juge d’une cour provinciale peut recevoir la dénonciation et faire comparaître la personne devant lui. Le juge qui reçoit la dénonciation a donc un pouvoir discrétionnaire de ne pas engager de procédure lorsque la dénonciation est sans fondement. De plus, le juge peut décider d’engager une procédure par voie de sommation plutôt que de lancer un mandat d’arrestation dans le cas où l’arrestation de la personne aurait été excessive et injustifiée.
- L’arrestation sans mandat ne peut être effectuée que dans des circonstances limitées : soit lorsque l’urgence de la situation rend difficilement réalisable le dépôt d’une dénonciation, soit lorsqu’une dénonciation a été déposée et une sommation décernée et, dans les deux cas, l’agent de la paix a des motifs raisonnables de croire que la mise sous garde de la personne est nécessaire afin de l’empêcher de mettre à exécution un acte terroriste.
- La personne mise sous garde doit être conduite devant un juge de la cour provinciale sans retard injustifié et dans un délai de vingt-quatre heures après son arrestation. Si le juge n’est pas disponible dans ce délai, la personne doit être conduite devant un juge de ce tribunal le plus tôt possible. Si une dénonciation n’avait pas été déposée avec le consentement du procureur général concerné avant la comparution de la personne mise sous garde devant le juge, celle-ci doit être mise en liberté.
- Lorsque la personne est mise sous garde et comparaît devant le juge, il incombe à l’agent de la paix d’établir les motifs pour lesquels celle-ci devrait demeurer sous garde.
- Le juge peut ordonner la détention de la personne jusqu’à l’audience, mais cette détention ne doit pas excéder 48 heures.
- À l’audience, le juge qui présidait doit être convaincu par la « preuve » apportée que les soupçons de l’agent de la paix sont fondés sur des motifs raisonnables.
- Les dispositions relatives à l’engagement assorti de conditions sont à nouveau visées par une clause de temporisation de cinq ans. Leur application ne peut être prorogée que par une résolution adoptée par les deux chambres du Parlement.
En vertu du paragraphe 83.31(3), le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile doit présenter un rapport annuel au Parlement sur l'application du pouvoir d'arrestation sans mandat, tel que précisé dans l'introduction.
Le paragraphe 83.31(3.1) exige que le procureur général du Canada et le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile donnent leur opinion, avec motifs à l’appui, sur la prorogation éventuelle de l’article 83.3.
Le paragraphe 83.31(4) prévoit que ces rapports annuels ne doivent pas contenir de renseignements dont la divulgation pourrait compromettre ou miner une investigation en cours relativement à une infraction au titre d'une loi du Parlement. Les rapports ne doivent pas non plus divulguer des renseignements qui mettraient en péril la vie ou la sécurité d'une personne, qui porteraient atteinte à des procédures judiciaires ou qui iraient à l'encontre de l'intérêt public.
L'article 83.32 contient une clause de temporisation en vertu de laquelle ces pouvoirs cesseront de s'appliquer à la fin du quinzième jour de séance du Parlement après le cinquième anniversaire de l’entrée en vigueur de ce paragraphe, à moins que, avant la fin de la journée, l’application des articles pertinents n’ait été prorogée conformément à la procédure prévue au paragraphe 83.32(2).
5. Statistiques
Alinéa 83.31(3)a) : nombre d’arrestations effectuées sans mandat et période de détention |
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Alinéa 83.31(3)b) : nombre de cas d’arrestation sans mandat et libération: 1. par un agent de la paix en vertu de l’alinéa 83.3(5)b); |
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6. Opinion du ministre de la Sécurité publique
Le Rapport public de 2014 sur la menace terroriste pour le Canada rédigé par le gouvernement souligne que les extrémistes violents ailleurs dans le monde, particulièrement l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL) et ses sympathisants, ont identifié le Canada comme une cible pour attentats terroristes. Le Canada demeure à risque d’être ciblé par des extrémistes violents au Canada qui agissent seuls ou qui opèrent en petites cellules ou de Canadiens qui participent à des activités terroristes à l’étranger et qui reviennent au Canada ou dans un autre pays empreints de connaissances, de compétences et d’expériences acquises dans des opérations terroristes ou dans des camps d’entraînement. Autrement dit, le Canada demeure à risque d’être ciblé par des terroristes et les récents attentats perpétrés à Ottawa et à Saint-Jean-sur-Richelieu n’ont fait que confirmer cette triste réalité.
Les engagements assortis de conditions donnent aux autorités policières le pouvoir essentiel d’agir rapidement, si les circonstances l’obligent. Ce pouvoir peut aussi être utilisé pour la prévention, la perturbation et la dissuasion des actes terroristes. Contrairement aux autres mesures existantes dans le Code criminel, ce pouvoir est parfaitement adapté à la nature de la structure terroriste et au type d’activités terroristes.
Le fait que les engagements assortis de conditions n’aient pas été utilisés alors qu’ils étaient disponibles entre 2001 et 2007, ou entre le 15 juillet 2013 et le 14 juillet 2014, donne à penser que la police perçoit ces dispositions unique comme des mesures préventives. Cela montre aussi que les autorités policières ne prenne pas à la légère les pouvoirs soigneusement définis que leur a donnés le Parlement et qu’elles étaient sensibles aux possibles conséquences de l’exercice de tels pouvoirs.
L’évaluation globale est que cette disposition remplit son objectif original d’assurer la protection des Canadiens et de la communauté mondiale, ainsi que des libertés civiles, qu’elle demeure un atout précieux pour l’application de la loi, et qu’elle doit demeurer disponible.
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1. Pour les besoins du présent rapport, les données qu'il contient comprennent les exigences relatives à la présentation de rapports pour le Yukon, les Territoires-du-Nord-Ouest et le Nunavut.
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