Sommaire d’évaluation final du programme Thérapie multisystémique
Table des matières
Sommaire
Le programme Thérapie multisystémique (TMS) est un programme de prévention fondé sur des données probantes très utilisé qui vise à réduire le comportement antisocial et la récidive chez les jeunes à risque. De 2009 à 2014, le CNPC a versé quelque 2,1 millions de dollars pour financer le projet TMS mis en œuvre par l'Agincourt Community Services Association (ACSA). Le projet TMS de l'ACSA ciblait les jeunes à risque de 12 à 17 ans qui vivaient avec un principal fournisseur de soins dans les limites de Scarborough, en Ontario. L'évaluation des impacts a permis d'établir la mesure dans laquelle les effets attendus à court terme ont été obtenus. Plus de 80 % des 48 jeunes ayant terminé le programme ont perdu au moins 20 points sur l'échelle d'évaluation du fonctionnement de l'enfant et de l'adolescent (Child and Adolescent Functional Assessment Scale ou CAFAS) entre le moment où ils ont commencé le programme et le moment où ils l'ont quitté, ce qui constitue une amélioration clinique importante. Quant aux neuf jeunes n'ayant pas terminé le programme, environ 33 % d'entre eux ont connu une baisse similaire de points sur la CAFAS. Trois mois après leur admission, davantage de jeunes ayant terminé le programme (comparativement aux jeunes qui ne l'ont pas terminé) vivaient à la maison, allaient à l'école, suivaient une formation professionnelle ou travaillaient au moins 20 heures par semaine, et n'avaient pas été arrêtés pour une infraction commise pendant le programme TMS. À leur départ, 75 % des jeunes ayant terminé le programme fréquentaient des pairs prosociaux et participaient à des activités prosociales, comparativement à 29 % des jeunes ne l'ayant pas terminé.
Note de l'auteur
Les opinions exprimées dans le présent document sont celles de l'auteur et ne traduisent pas nécessairement celles de Sécurité publique Canada. Prière d'acheminer toute correspondance à propos du présent rapport à l'adresse suivante : Division de la recherche, Sécurité publique Canada, 269, avenue Laurier Ouest, Ottawa (Ontario) K1A 0P8. Courriel : PS.CSCCBResearch-RechercheSSCRC.SP@ps-sp.gc.ca.
Renseignements sur le produit
© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2015
No de Cat : PS113-1/2015-15F-PDF
ISBN 978-0-660-02171-3
Introduction
Le programme Thérapie multisystémique (TMS) est un programme de prévention fondé sur des données probantes très utilisé qui vise à réduire le comportement antisocial et la récidive chez les jeunes à risque (Henggeler et coll., 2009). Le programme a vu le jour aux États-Unis au milieu des années 1970, lorsque Scott Henggeler a été embauché par le département de pédiatrie de l'État de la Virginie pour travailler à quelques-uns de ses cas les plus difficiles. M. Henggeler a décidé qu'au lieu de faire suivre une thérapie aux jeunes en clinique, il serait plus efficace d'intervenir directement dans leur milieu de vie, soit chez eux, à leur école et dans les endroits où ils passent leur temps libre. Après plusieurs années d'étude et de développement, on a formé MST Services en 1996 pour faire connaître l'intervention à plus grande échelle, octroyer des licences et offrir de l'aide pour le démarrage et la formation, ainsi que pour fournir un soutien continu en matière d'assistance technique et d'assurance de la qualité.
En avril 2010, l'Agincourt Community Services Association (ACSA), financée par le Centre national de prévention du crime (CNPC), a commencé à mettre en œuvre le programme TMS afin de s'attaquer aux comportements agressifs et socialement inacceptables chez les jeunes à risque dans le district de Scarborough, à Toronto, en Ontario. Le principal objectif du programme consistait à empêcher ces jeunes d'avoir des démêlés initiaux ou subséquents avec le système de justice pénale. Selon le calendrier initial, l'accord de contribution visant le projet TMS devait prendre fin le 31 mars 2013. Cependant, en avril 2013, une prolongation d'un an a été accordée au projet TMS de l'ACSA et, par conséquent, à l'étude d'évaluation. De 2009 à 2014, le CNPC a versé près de 2,1 millions de dollars pour financer le projet TMS de l'ACSA.
Au Canada, une évaluation de la mise en œuvre du programme TMS dans des sites multiples (London, Mississauga, comté de Simcoe et Ottawa) a été effectuée (Leschied et Cunningham, 2002), mais aucun impact sur le comportement délinquant n'a été observé. Contrairement à de nombreuses évaluations du programme TMS menées aux États-Unis et ailleurs (Henggeler et coll., 2009), les résultats finaux de l'étude canadienne n'ont montré aucune différence statistiquement significative entre les participants et les non-participants au programme en ce qui concerne les principaux effets relatifs au système de justice pénale, comme le nombre de déclarations de culpabilité et de jours de détention. Par conséquent, il est nécessaire d'évaluer davantage les projets TMS mis en œuvre dans le contexte canadien afin d'obtenir plus de preuves quant à l'efficacité du programme.
Le CNPC a attribué un contrat à une entreprise de recherche indépendante, Harry Cummings and Associates Inc., pour qu'elle effectue l'évaluation des impacts. L'étude d'évaluation, d'une valeur de 250 000 $, a commencé en octobre 2010 et a pris fin en avril 2014. Toutes les constatations énoncées dans le présent sommaire se fondent sur les résultats du rapport d'évaluation final soumis au CNPC le 25 juillet 2014.
Description du programme
Le programme TMS est une intervention intensive à court terme de trois à cinq mois qui comprend environ 60 heures d'intervention personnalisée pour chacun des jeunes participants. Il met l'accent sur l'écologie sociale des jeunes à risque, en mobilisant le jeune et sa famille afin de réduire les facteurs de risque et de renforcer les facteurs de protection en ce qui concerne les relations avec la famille, les pairs, l'école et la collectivité. Les thérapeutes du programme TMS travaillent de près avec les parents des jeunes afin de concevoir des stratégies visant à favoriser et à suivre les réussites des participants à la maison, à l'école et dans la collectivité. Les séances ont lieu au moins deux fois par semaine dans l'environnement naturel des jeunes, c'est-à-dire généralement dans le foyer familial. Les principales ressources gérant et exécutant le projet TMS de l'ACSA consistaient en un superviseur, quatre thérapeutes, un commis aux données et un clinicien à l'admission ou adjoint à la recherche.
Groupe cible
Le projet TMS de l'ACSA ciblait les jeunes de 12 à 17 ans qui vivaient avec un principal fournisseur de soins dans les limites de Scarborough et qui remplissaient au moins un des critères suivants :
- risque imminent d'être placés à l'extérieur du foyer;
- problèmes de délinquance, d'école buissonnière et de rendement scolaire (p. ex. expulsion ou décrochage scolaire, déclaration de culpabilité);
- comportement agressif non violent (p. ex. agression verbale et menaces);
- comportement violent entraînant des blessures;
- signes de consommation de substances dans le contexte des problèmes énumérés ci-dessus.
Le superviseur du projet TMS de l'ACSA et le conseiller du programme ont conjointement évalué les risques en se basant sur l'information contenue dans les formulaires de référence et sur les consultations de suivi, au besoin (avec l'école ou les parents, par exemple). Les formulaires ont d'abord été examinés par le superviseur du projet TMS. Dès le début du projet, le superviseur s'est servi des critères présentés ci-dessus pour prendre la décision de refuser ou d'accepter les références. La Child and Adolescent Functional Assessment Scale (CAFAS) est ensuite venue compléter cette procédure. La CAFAS évalue le niveau d'incapacité fonctionnelle dans huit domaines de comportements et d'émotions chez les enfants et les jeunes (comportement à l'école et au travail, comportement à la maison, comportement dans la collectivité, comportement envers les autres, humeur/émotions, comportement autodestructeur, toxicomanie, pensée). La CAFAS a été utilisée pour évaluer le programme TMS et est vue comme une mesure sensible au changement dans les domaines ciblés par le programme (Timmons-Mitchell et coll., 2006).
Les jeunes étaient dirigés vers le programme par le conseil scolaire du district catholique de Toronto (50,5 %), la Children's Aid Society (24,7 %), les parents (5,4 %) et d'autres sources (19,4 %). Au total, 94 jeunes ont été admis au programme et l'ont quitté (69 jeunes ont terminé le programme, et 25 jeunes ont quitté le programme avant de l'avoir terminé). Des 25 jeunes n'ayant pas terminé le programme, 11 ont dû partir pour manque de participation, 4 ont été placés dans un milieu où l'accès était restreint, et 3 ont déménagé à l'extérieur de la région où le programme était mis en œuvre.
Objectifs de l’évaluation
Les objectifs de l'évaluation étaient les suivants :
- évaluer dans quelle mesure le programme a été mis en œuvre comme prévu;
- déterminer si les effets attendus ont été obtenus et s'il s'est produit des effets imprévus;
- fournir une analyse descriptive des coûts du projet et une analyse coût-efficacité des principaux effets;
- cerner les leçons apprises, en examinant ce qui a bien fonctionné et ce qui a moins bien fonctionné, et formuler des recommandations pour renforcer le programme afin d'aider tous ceux qui désirent mettre en œuvre ou soutenir une initiative de ce genre ultérieurement;
- évaluer dans quelle mesure le programme a été adapté de manière à répondre aux besoins des jeunes et de la collectivité.
Méthode d’évaluation
En raison de difficultés imprévues, l'approche méthodologique globale de l'évaluation a été modifiée. Au départ, les effets du programme devaient être évalués à l'aide d'un devis à mesures répétées faisant appel à un groupe expérimental différé, dans le cadre duquel les participants au programme seraient comparés à un groupe admissible de jeunes attendant de recevoir des services du projet TMS de l'ACSA. Toutefois, la tenue d'une longue liste d'attente s'est avérée incompatible avec la philosophie et les objectifs du programme. En outre, il a été impossible de trouver un groupe témoin convenable au centre de l'ACSA ou dans la région élargie de Scarborough. Par conséquent, les jeunes qui n'ont pas terminé le programme ont servi de groupe témoin. Au bout du compte, 69 jeunes ont terminé le programme, alors que 25 l'ont quitté pour différentes raisons, y compris un manque de participation.
Une analyse descriptive des coûts a été effectuée. Cependant, compte tenu de l'absence de données de la CAFAS pour une grande partie du groupe expérimental du projet TMS de l'ACSA (38 des 94 participants), on a décidé de ne pas réaliser d'analyse coût-efficacité. Une analyse des économies de coûts n'a pas non plus été effectuée pour le projet TMS de l'ACSA compte tenu de la petite taille de l'échantillon et du groupe témoin.
Outils de mesure et collecte des données
Afin de déterminer si le projet TMS de l'ACSA a été mis en œuvre comme prévu et a eu des effets bénéfiques sur les participants, on recueillait régulièrement des données sur les processus et les effets du programme à l'aide d'instruments normalisés, notamment le Referral, Screening and Enrolment Tracking Form, la CAFAS, la Therapist Adherence Measure – Revised (TAM-R), le Case Tracking Form, le Program Implementation Review Tracking Form, le Project Cost Tracking Form, ainsi que les Key Informant Interview Guides pour les thérapeutes, les superviseurs et les familles.
L'évaluation des impacts portait sur les indicateurs d'effets suivants (mesurés à l'aide de la CAFAS) : jeunes vivant à la maison; jeunes allant à l'école; jeunes participant à des activités prosociales; taux d'infraction; comportement antisocial; et capacité de fonctionnement accrue. Les mesures répétées basées sur la CAFAS ont été prises dans les 14 jours suivant l'admission (T1) ou immédiatement avant l'intervention (T1a), 3 mois après l'admission (T2), au départ du programme, soit normalement 5 mois après l'admission (T3), 6 mois après l'admission (T4) ainsi que 12 mois après l'admission (T5). Cependant, très peu de jeunes et de familles ont participé aux étapes de suivi T4 et T5.
Lorsque cela était approprié, des tests de différences entre les moyennes et les pourcentages des groupes, ainsi que des modèles statistiques plus sophistiqués, ont servi à évaluer les différences dans les mesures des effets entre le groupe expérimental et le groupe témoin. Dans ces analyses, les variables démographiques, les antécédents de délinquance et les autres caractéristiques du jeune et de la famille ont été évalués et mesurés, ce qui a permis d'accroître la validité des comparaisons entre le groupe expérimental et le groupe témoin.
On a analysé les données de 94 jeunes seulement jusqu'à leur départ du programme, n'ayant pas réussi à obtenir des données de suivi après leur départ. Ce groupe était constitué de 69 jeunes ayant terminé le programme (c'est-à-dire qu'ils l'ont quitté à la suite d'un consentement mutuel) et de 25 jeunes n'ayant pas terminé le programme (c'est-à-dire qu'ils l'ont quitté pour différentes raisons, y compris leur manque de participation). Des mesures de base et de suivi de la CAFAS ont été recueillies pour un total de 57 jeunes (48 jeunes ayant terminé le programme et 9 ne l'ayant pas terminé).
Résultats
Constatations tirées de l’évaluation des processus
L'évaluation des processus a permis d'établir dans quelle mesure le projet a été mis en œuvre comme prévu.
La plupart des pratiques et des caractéristiques du programme ont été respectées. Une des principales exceptions concernait la durée moyenne globale de l'intervention. Tout au long du projet, et jusqu'à la fin de mars 2014, une intervention durait en moyenne de 33 à 51 jours de plus que les 120 jours prévus. La moyenne globale est demeurée très près du maximum visé de 150 jours. Pendant la dernière période ayant fait l'objet d'un rapport, laquelle a pris fin en mars 2014, une intervention durait en moyenne 139 jours, soit 19 jours de plus que la moyenne prévue de 120 jours. La longue durée des interventions observée dans les premières périodes de rapport s'explique en partie par des enjeux liés au roulement des thérapeutes.
Les membres de l'équipe du projet TMS de l'ACSA ont reçu une formation obligatoire ainsi qu'une formation supplémentaire en thérapie cognitivo-comportementale, en évaluation et en prévention des cas de suicide ainsi qu'en usure de compassion. Le taux de roulement des thérapeutes était de 75 % pendant la première année. Trois nouveaux thérapeutes ont été engagés, et aucun autre enjeu lié aux ressources humaines n'est survenu jusqu'à la fin du contrat original, en mars 2013.
En ce qui a trait aux participants au programme, 125 jeunes ont été aiguillés vers le programme et 94 d'entre eux (75 %) ont été admis. Des 94 jeunes ayant quitté le programme, 69 (73 %) l'ont quitté à la suite d'un consentement mutuel, et 25 (27 %), pour d'autres raisons (ils n'ont pas terminé le programme).
L'objectif voulant que moins de 5 % des départs soient attribuables à un manque de participation n'a pas été atteint. En effet, environ 12 % des jeunes ont quitté le programme en raison d'un manque de participation. Cependant, il est important de noter que les départs liés au manque de participation ont grandement diminué au cours des deux dernières années du programme. Environ 82 % des jeunes ayant quitté le programme en raison d'un manque de participation l'ont fait entre 2010 et 2012, alors que 18 % l'ont fait en 2013 ou en 2014.
Les objectifs minimaux d'inscription au programme n'ont pas été atteints. L'ACSA avait comme objectif d'intervenir auprès de 16 jeunes la première année (4 jeunes par thérapeute), 32 la deuxième année, 34 la troisième année et 32 la quatrième année, pour un total de 114 jeunes sur une période de quatre ans. En tout, 17 jeunes ont commencé le programme en 2010, 26 en 2011, 29 en 2012 et 22 en 2013, pour un total de 94 jeunes. Combinés à l'incertitude du financement pour la quatrième année et à la nécessité de reprendre le programme depuis le début avec l'arrivée de nouveaux jeunes dirigés vers le programme à la fin avril et en mai 2013, les enjeux liés au roulement du personnel ont nui à la capacité de l'équipe d'intervenir auprès d'un maximum de jeunes.
Comme la continuation du programme au-delà de mars 2013 était incertaine, l'équipe a cessé d'accepter les références en novembre 2012 pour s'assurer qu'aucun dossier ne soit clos en pleine intervention. En novembre 2012, le nombre total de dossiers ouverts était de 14 (soit 3,5 dossiers par thérapeute), et la charge de travail moyenne a diminué pendant les quatre mois suivants alors que le programme tirait à sa fin.
Trois semaines après la fin du programme en mars 2013, le renouvellement du financement a été confirmé pour une autre année, et trois des quatre thérapeutes ont retrouvé leur poste. La planification de la relève a été lancée au début de cette période; lorsque l'ancien superviseur a quitté l'organisation, il a rapidement été remplacé par un thérapeute chevronné. Deux nouveaux thérapeutes ont été recrutés et ont participé aux cinq journées d'orientation, en juillet 2013. Ils se sont perfectionnés en se joignant à une équipe expérimentée qui pouvait leur offrir des services de mentorat et de jumelage. La dernière admission a eu lieu en décembre 2013, et la charge de travail moyenne a diminué pendant les quatre mois suivants alors que le programme tirait à sa fin.
Le facteur de risque le plus couramment présenté par les jeunes dirigés vers le programme était le comportement agressif non violent (81 % des jeunes). Parmi les autres facteurs de risque, citons le comportement violent entraînant des blessures (34 %) et les signes de consommation de drogues (41 %). Les comportements de 25 % des jeunes dirigés vers le programme les exposaient au risque imminent d'être placés à l'extérieur du foyer, et 22 % des jeunes avaient été reconnus coupables d'une infraction criminelle avant d'être dirigés vers le programme. Seuls quelques participants (7 %) avaient été expulsés de l'école ou avaient décroché avant d'être dirigés vers le programme. Environ 47 % des jeunes dirigés vers le programme présentaient une incapacité fonctionnelle marquée ou sévère (risque élevé), selon un score à l'admission de 100 ou plus sur la CAFAS.
L'objectif de conformité globale moyenne a été atteint (moyenne de 0,61 à l'échelle TAM-R), et 76 % des jeunes ayant quitté le programme avaient obtenu un score moyen supérieur à 0,61, tout près de la cible de 80 %.
Le pourcentage de jeunes ayant terminé le programme a dépassé l'objectif minimum de 66 %. Des 94 jeunes (et leurs familles) qui ont quitté le programme, 69 (73 %) l'ont fait à la suite d'un consentement mutuel (après avoir terminé le programme). Des 25 jeunes n'ayant pas terminé le programme, 11 ont dû partir pour manque de participation, 4 ont été placés dans un milieu où l'accès était restreint, et 3 ont déménagé à l'extérieur de la région où le programme était mis en œuvre.
Constatations tirées de l’évaluation des impacts
L'évaluation des impacts a permis de déterminer la mesure dans laquelle les effets attendus ont été obtenus et s'il s'est produit des effets imprévus. Toutes les constatations tirées de l'évaluation des impacts portent sur les effets à court terme.
Malgré certaines difficultés pour ce qui est de faire remplir le questionnaire de la CAFAS, les données recueillies au sujet de 48 jeunes ayant terminé le programme montrent que la grande majorité des participants ont connu un changement positif relativement à leur incapacité fonctionnelle. Un peu plus de 80 % de ces jeunes ont perdu au moins 20 points entre le moment où ils ont commencé le programme et le moment où ils l'ont quitté, ce qui constitue une amélioration clinique importante. Quant aux neuf jeunes n'ayant pas terminé le programme, seulement 33 % d'entre eux ont connu une baisse similaire de points sur la CAFAS.
Trois mois après l'admission, plusieurs différences importantes ont été constatées entre les jeunes ayant terminé le programme et ceux qui l'ont quitté en cours de route. Ces données sont résumées au tableau 1 ci-dessous.
Effet |
Jeunes ayant terminé le programme |
Jeunes ayant quitté le programme en cours de route |
---|---|---|
Jeune vivant à la maison |
96 % (n = 65) |
61 % (n = 14) |
Jeune allant à l'école, suivant une formation professionnelle ou travaillant au moins 20 heures par semaine |
84 % (n = 58) |
75 % (n = 18) |
Jeune n'ayant pas été arrêté pour une infraction commise pendant le programme TMS |
84 % (n = 58) |
63 % (n = 15) |
À leur départ, 75 % des jeunes ayant terminé le programme fréquentaient des pairs prosociaux et participaient à des activités prosociales, comparativement à 29 % des jeunes ayant quitté le programme en cours de route.
Bien que l'échantillon soit petit, les analyses statistiques ont montré d'importantes différences pour certains effets chez des groupes particuliers. Notamment, les participants plus vieux étaient moins susceptibles de fréquenter des pairs prosociaux et de participer à des activités prosociales après avoir quitté le programme. De plus, les participants vivant avec un petit nombre de personnes étaient plus susceptibles d'aller à l'école, de suivre une formation professionnelle ou de trouver un emploi après avoir quitté le programme, et ils ont connu une variation plus importante de leurs points sur la CAFAS. À la lumière de ces derniers résultats, l'ACSA devrait envisager des stratégies visant les participants vivant avec un grand nombre de personnes, car ces participants risquent davantage d'échouer après avoir quitté le programme.
Malheureusement, l'évaluation n'a pu permettre de mesurer le maintien des effets bénéfiques après le programme. Très peu de jeunes et de familles ont accepté de remplir le questionnaire de la CAFAS après avoir quitté le programme (p. ex. 6 ou 12 mois plus tard); dans certains cas, les familles n'ont pas transmis leurs coordonnées lorsqu'elles ont déménagé.
L'information obtenue par l'équipe d'évaluation des impacts ne montre aucun effet imprévu.
Constatations tirées de l’analyse des coûts
Les coûts totaux du projet TMS pour la période de 2009 à 2014 étaient de quelque 2,1 millions de dollars. Environ 4 % de ces coûts ont été cumulés la première année (2009-2010), le reste des coûts étant réparti presque également sur les trois années suivantes. L'élément de coût le plus élevé du projet était le salaire du personnel (coordonnateur du programme et thérapeutes), qui représentait près de 1,5 million de dollars, soit 68 % des coûts du programme.
La moyenne des coûts d'intervention pour les 94 jeunes admis au programme était de 22 973 $, alors que la moyenne des coûts pour les 69 jeunes ayant terminé le programme (ceux qui l'ont quitté à la suite d'un consentement mutuel) était de 31 297 $. L'objectif initial du projet consistait à intervenir auprès de 114 jeunes sur une période de quatre ans. S'il avait été atteint, la moyenne des coûts d'intervention aurait été de 18 943 $. Comme la plupart des coûts d'exploitation du programme étaient fixes, il semble que les 20 jeunes supplémentaires prévus auraient pu bénéficier d'une intervention sans que le budget ne soit modifié.
Compte tenu de l'absence de données de la CAFAS pour une grande partie du groupe expérimental du projet TMS de l'ACSA (38 des 94 participants), on a décidé de ne pas effectuer d'analyse coût-efficacité. Ainsi, la somme à investir dans le programme pour entraîner des changements dans les principaux effets d'intérêt reste inconnue. Aucune analyse des économies de coûts n'a été réalisée pour le projet TMS de l'ACSA compte tenu de la petite taille de l'échantillon et du groupe témoin.
Discussion
Recommandations liées à la prestation des services et à la fidélité au programme TMS
Des enjeux liés au roulement des thérapeutes ont causé des interruptions temporaires du programme et empêché la pleine prestation des services pendant de brèves périodes. Rappelons que le programme TMS est une forme d'intervention intensive et exigeante qui peut entraîner des enjeux liés à l'attrition chez les thérapeutes. Un autre facteur est venu compliquer le déroulement du projet TMS de l'ACSA, soit le court préavis de son prolongement pour une quatrième année. La précarité de l'emploi pendant cette période a mené à un roulement supplémentaire des thérapeutes et à un essoufflement pendant la dernière année du programme.
Il est recommandé de prévoir un nombre suffisant de thérapeutes pour disposer de ressources et de capacités additionnelles qui sauront répondre aux exigences élevées des jeunes et de leurs familles.
Recommandations liées à la collecte et à la gestion des données
Deux sociétés d'experts-conseils ont été engagées pour mener les évaluations des processus et des impacts du projet TMS de l'ACSA. L'évaluation des processus a été lancée au début du projet, alors que le plan d'évaluation des impacts a été élaboré et lancé près d'un an après le début du projet. Des familles bénéficiaient déjà d'une intervention à ce moment. Les outils de collecte de données ont été améliorés et étoffés un an après le lancement du projet. Par conséquent, les caractéristiques démographiques et les renseignements sur la famille des premiers cas admis étaient moins complets, et aucune donnée de la CAFAS n'a été recueillie pour 20 familles qui ont entamé le programme avant juin 2011. Il est recommandé d'engager l'équipe d'évaluation des impacts à l'étape de la conception du projet ou, à tout le moins, à l'étape préalable à sa mise en œuvre, pour garantir que les outils de collecte de données répondent aux principales questions d'évaluation, et que des données de base sont recueillies sur tous les participants.
L'équipe du projet TMS de l'ACSA a fait face à des défis constants dans sa tentative de faire participer les jeunes et les familles à l'évaluation de la CAFAS après le programme, et de faire remplir la CAFAS à intervalles réguliers par tous les participants. Il est recommandé de consacrer suffisamment d'heures-personnes au maintien d'une stratégie de suivi normalisée et périodique (comme des vérifications toutes les deux semaines), pour suivre et confirmer l'emplacement des jeunes participants et de leurs familles et ainsi recueillir des données sur eux de façon uniforme et régulière. On devrait envisager de faire appel aux thérapeutes du programme TMS pour procéder ou aider à la collecte de données après le programme. En effet, les thérapeutes ont établi une relation de confiance avec les jeunes et les familles et peuvent donc plus facilement susciter leur intérêt et leur collaboration. Il est recommandé de s'assurer que les organismes concluent des ententes officielles avec les jeunes et les familles, en précisant l'importance de l'évaluation et le rôle essentiel des jeunes et des familles à cet égard. Il est recommandé de s'assurer que les organismes établissent de solides relations avec les intervenants pertinents (comme les écoles et les services de police), qui peuvent fournir des données secondaires sur les effets observés chez les jeunes.
Références
- HENGGELER, S.W., C.M. BORDUIN, S.K. SCHOENWALD, S.J. HUEY et J.E. CHAPMAN. MST Therapist Adherence Measure - Revised (TAM-R),Charleston (Caroline du Sud), Medical University of South Carolina, Family Services Research Center, 2006.
- HENGGELER, S.W., S.K. SCHOENWALD, C.M. BORDUIN, M.D. ROWLAND et P.B. CUNNINGHAM. Multisystemic Therapy for Antisocial Behavior in Children and Adolescents, 2e éd., New York (New York), Guilford Press, 2009.
- HODGES, K. Child and Adolescent Functional Assessment Scale, publié sous la direction de T. Grisso, G. Vincent et D. Seagrave,New York (New York), Guilford Press, 2005, p. 123-136, « Mental health screening and assessment in juvenile justice ».
- LESCHIED, A.W., et A. CUNNINGHAM. Interim Results of a Four-Year Randomized Study of Multisystemic Therapy in Ontario, Canada, Centre for Children and Families in the Justice System of the London Family Court Clinic, London (Ontario), 2002.
- TIMMONS-MITCHELL, J., M.B. BENDER, M.A. KISHNA ET C.C. MITCHELL. « An Independent Effectiveness Trial of Multisystemic Therapy with Juvenile Justice Youth », Journal of Clinical Child and Adolescent Psychology, vol. 35, no 2, 2006, p. 227-236.
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