Le déni constitue-t-il toujours un problème pour les délinquants sexuels?

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Recherche en bref
Vol. 13 No. 4
Juillet 2008

Question

Quel est le rapport entre le déni et la récidive chez les délinquants sexuels?

Contexte

Lorsque des individus commettent des transgressions graves, on croit généralement que, pour se réadapter et assurer leur réinsertion sociale, les délinquants doivent reconnaître leurs fautes. Dans la plupart des cas, les programmes de traitement n'acceptent pas les délinquants qui nient avoir commis des infractions. De même, les évaluateurs qui effectuent des évaluations du risque citent souvent le déni au nombre des facteurs qui font augmenter le risque de récidive.

Le déni est fréquent chez les délinquants sexuels, et ce, même après leur condamnation. Chose étonnante, les délinquants sexuels qui admettent avoir commis des infractions et ceux qui nient celles-ci présentent des taux de récidive sexuelle identiques (de 10 à 15 % environ après cinq ans). Même si cette constatation revient à de nombreuses reprises, la plupart des études ne se penchent que sur des moyennes de groupe. Cependant, le déni ne constitue peut-être un problème que pour des sous-groupes particuliers. Par exemple, le déni peut poser problème dans le cas des délinquants sexuels à risque élevé parce qu'il pourrait les empêcher de déployer les efforts de réadaptation nécessaires pour réduire le risque de récidive qu'ils présentent.

Méthode

Le rapport entre le déni, le risque de récidive et la récidive sexuelle a été examiné dans trois échantillons de délinquants sexuels : a) 489 qui avaient été évalués lors du prononcé de leur peine en Ontario; b) 490 dont la candidature avait été envisagée pour la participation à un programme de déjudiciarisation dans l'État de Washington, aux États-Unis; c) 73 qui purgeaient une peine de ressort fédéral dans la région du Pacifique du Service correctionnel du Canada. Dans chaque échantillon, le déni a été évalué au moyen d'une entrevue et d'un examen du dossier. Le risque de récidive sexuelle a été évalué à l'aide d'un outil actuariel simplifié. La récidive sexuelle était fondée sur les dossiers officiels s'échelonnant sur des périodes de suivi moyennes dont la durée variait entre cinq et huit ans.

Réponse

Comme on l'a constaté dans des recherches antérieures, il n'y avait pas de lien global entre le déni et la récidive sexuelle. On a toutefois observé des schémas différents, pour divers sous‑groupes. Contrairement aux attentes, le déni était associé à une augmentation du risque chez les délinquants à risque faible et à une diminution du risque chez les délinquants à risque élevé. Les hommes qui ne s'en prennent qu'à des victimes ayant un lien de parenté avec eux (délinquants incestueux) sont généralement classés comme étant des délinquants à risque faible. L'étude a révélé que les délinquants incestueux qui niaient avoir commis des crimes étaient environ trois fois plus susceptibles de récidiver que les délinquants incestueux qui reconnaissaient leurs crimes (p. ex., 15 % contre 5 %). Le déni avait relativement peu à voir avec les taux de récidive sexuelle des violeurs et des agresseurs d'enfants extrafamiliaux (en moyenne, environ 17 % de ces échantillons). Les mêmes résultats ont été constatés dans les trois échantillons.

Incidences sur les politiques

  1. Le déni devrait être pris en compte dans l'évaluation et le traitement des délinquants incestueux. Non seulement le déni est-il blessant pour les victimes d'inceste, mais il est aussi associé à l'augmentation du risque de récidive chez les agresseurs.
  2. Le déni ne devrait pas être considéré comme un facteur aggravant chez les délinquants sexuels que l'on pense déjà fortement susceptibles de récidiver. Les délinquants qui nient leurs actes pourraient avoir besoin d'interventions spéciales, mais rien n'indique qu'en soi, le déni fasse augmenter encore davantage le risque de récidive sexuelle qu'ils présentent. De même, le déni est rarement permanent; les délinquants sont souvent plus disposés à s'ouvrir une fois qu'une relation de confiance est établie.
  3. Il faudra mener d'autres recherches sur les facteurs susceptibles d'atténuer l'influence du déni sur la récidive, comme le soutien communautaire à l'égard du déni et la participation efficace à un programme de traitement.

Source

Pour de plus amples renseignements

R. Karl Hanson, Ph.D.
Recherche correctionnelle
Sécurité publique Canada
340, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0P8
Tél. : 613-991-2840
Téléc. : 613-990-8295
Courriel : Karl.Hanson@ps-sp.gc.ca

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