Résumé de recherche: Examen des populations clés dans le contexte de la mise en œuvre d'initiatives de prévention et d'intervention en matière de cyberintimidation
Analyse documentaire sur le rôle de la famille dans le contexte de la prévalence, de la prévention et de l'intervention en matière de cyberintimidation.
Question
L'objectif principal du rapport est d'examiner et de synthétiser la littérature sur le rôle/l'implication des familles dans le contexte de la mise en œuvre d'initiatives de prévention et d'intervention en matière de cyberintimidation. Une analyse documentaire antérieure réalisée pour Sécurité publique Canada, intitulée Recherche sur la cyberintimidation au Canada : Examen systématique (Farrington et coll., 2019) a révélé qu'il existe un manque de connaissances dans ce domaine. Ainsi, cette analyse de la cyberintimidation s'est concentrée sur la littérature concernant la façon dont les familles sont comprises comme des facteurs de risque et des facteurs de protection, le rôle qu'elles jouent dans les initiatives de cyberintimidation, les types d'initiatives impliquant les familles qui existent actuellement et la façon dont les composantes propres aux familles ont été examinées et mesurées à ce jour. Ce rapport présentera une analyse systématique de la littérature universitaire et de la littérature grise, du Canada et de l'étranger, sur le sujet.
Méthode
Cette analyse documentaire se limite à la littérature écrite en anglais et consultée à la suite de recherches sur le Web du début des années 2000 à aujourd'hui, apparaissant dans les bases de données électroniques (articles de revues académiques et articles revus par les pairs) et dans des sources sélectionnées de littérature grise (par exemple, des publications gouvernementales), et n'inclut pas de consultation ou d'entretien. La recherche a porté sur la littérature canadienne et étrangère.
Un total de 162 articles portant sur le rôle des familles dans la prévalence, la prévention et l'intervention en matière de cyberintimidation ont été analysés. Les articles datent de 2004 à 2021 (la majorité des articles datant de 2018 à 2021) et couvrent 61 pays (la plupart provenaient des États-Unis). En outre, 69 articles discutaient d'un total de 40 initiatives de prévention et d'intervention en matière de cyberintimidation. Parmi celles-ci, 22 initiatives comprenaient des composantes familiales.
Constatations
La littérature sur le rôle des familles en matière de cyberintimidation est relativement récente, avec une augmentation très récente du nombre d'articles publiés. Cette analyse documentaire a permis d'identifier plusieurs concepts clés dans la recherche sur le rôle des familles en matière de cyberintimidation, notamment les relations aidant-enfant et la dynamique familiale, la médiation parentale, les styles de parentage, les structures sociales élargies et les données démographiques des familles. Les constatations liées à ces concepts identifient les facteurs de risque et de protection.
En ce qui concerne le domaine le plus étudié – les relations aidant-enfant et la dynamique familiale – il a été constaté que des relations et des milieux familiaux médiocres ou turbulents sont positivement associés à la cybervictimisation et à la cyberintimidation. En particulier, la violence familiale, les dysfonctionnements, les conflits, la négligence, le rejet et les abus ont des liens indirects avec la cyberintimidation. Un milieu familial difficile et des relations médiocres ou abusives avec les aidants mènent les enfants et les jeunes à développer des liens anxieux, vulnérables et peu sûrs avec leurs pairs, à imiter la violence qu'ils voient à la maison ou à agir en ligne de façon à retrouver le pouvoir et l'attention qui leur manquent à la maison. En revanche, les attachements positifs à la famille, la cohésion et l'expressivité à la maison sont négativement associés à la cyberintimidation. Dans un milieu familial positif, les enfants et les jeunes se sentent écoutés, soutenus et guidés pour développer un comportement individuel et prosocial positif. La formation des parents sur le développement de relations saines chez leurs enfants et jeunes adolescents serait un domaine clé à cibler dans les programmes de prévention et d'intervention en matière de cyberintimidation. En outre, le fait de cibler et d'appuyer les familles qui risquent d'adopter des comportements violents et agressifs à la maison peut réduire la cyberintimidation. Enfin, l'amélioration de la conscience qu'ont les aidants de leurs propres comportements et interactions sociales et la mise en évidence du rôle essentiel qu'ils jouent en modélisant des comportements positifs et négatifs peuvent servir à diminuer la probabilité d'une implication dans la cyberintimidation ou à l'augmenter.
Un deuxième domaine à cibler dans les programmes de prévention et d'intervention porte sur les stratégies de médiation parentale. La recherche sur les stratégies de médiation parentale, dans l'ensemble, met en lumière l'association négative entre la médiation instructive (discuter du contenu en ligne et des stratégies ou de la gestion avec les enfants et les jeunes; élaborer et établir conjointement des règles d'utilisation; fixer des attentes et donner des conseils sur les comportements en ligne appropriés) et la cybervictimisation ainsi que la cyberintimidation. Il sera essentiel de fournir aux aidants ces stratégies de médiation fondées sur des données probantes sera essentiel pour prévenir les interactions et les relations en ligne préjudiciables et intervenir, au besoin.
Un troisième domaine à cibler dans les programmes de prévention et d'intervention concerne la connaissance et la sensibilisation des parents en ce qui a trait aux comportements en ligne de leurs enfants et de leurs jeunes. Les aidants ont tendance à avoir des informations inexactes sur les comportements en ligne des enfants et des jeunes dont ils s'occupent ou à surestimer les problèmes. Accroître leurs connaissances et leur sensibilisation peut permettre aux familles d'adapter ou de perfectionner leurs stratégies de médiation et d'apporter des améliorations.
Un quatrième domaine à cibler dans les programmes familiaux de lutte contre la cyberintimidation est celui des styles de parentage. En général, la recherche montre des associations positives entre les styles de parentage autoritaires et adoptant une attitude de « laisser-faire » et la cybervictimisation et la cyberintimidation, et une association négative entre les styles de parentage encadrant et la cybervictimisation et la cyberintimidation. En permettant aux aidants de développer des stratégies parentales de soutien qui fixent des limites appropriées concernant les comportements hors ligne et en ligne, le risque de cyberintimidation est du même coup réduit.
Cette analyse a mis en évidence le fait qu'il ne suffit pas de travailler avec les aidants et les familles pour lutter contre la cyberintimidation. Une approche socioécologique est nécessaire. Les programmes de prévention et d'intervention doivent inclure les contextes sociaux (école, collectivité) dans lesquels l'enfant ou le jeune vit, apprend et travaille, ainsi que toutes les relations sociales qui jouent un rôle central dans son développement, comme les pairs et les enseignants. La structure sociale au sens large va au‑delà de la « famille », mais a été incluse dans cette analyse en tant que médiateur important dans la relation entre les facteurs familiaux et la cyberintimidation, car les recherches ont souvent montré des liens entre ces facteurs. En général, la recherche a révélé que de mauvaises relations avec les pairs et/ou le fait d'avoir des pairs qui pratiquent la cyberintimidation constituaient un mécanisme qui expliquait partiellement la relation entre la dynamique familiale, la médiation parentale et les styles de parentage et la cyberintimidation. En revanche, les relations positives et favorables avec les pairs et l'environnement scolaire constituaient un mécanisme de protection dans la relation entre la dynamique familiale, la médiation parentale et les styles de parentage ainsi que la cyberintimidation et la cybervictimisation. Certaines études ont également noté l'importance des pairs pour l'enseignement et la socialisation des principaux mécanismes d'adaptation. Ainsi, les programmes de prévention et d'intervention pour lutter contre la cyberintimidation nécessitent une approche écologique sociale, et la famille n'est qu'un contexte critique qui doit être soutenu.
Un autre domaine clé de la recherche identifié dans cette analyse concerne les données démographiques familiales. Dans l'ensemble, les recherches ont révélé des associations entre les données démographiques familiales et la cybervictimisation, et seules quelques études ont examiné la cyberintimidation. Des associations positives ont été trouvées entre les familles reconstituées, les familles monoparentales, les familles divorcées et les familles à faible revenu et la cybervictimisation, ce qui suggère que la composition démographique des familles peut jouer un rôle dans la prévalence de la cybervictimisation. Ces associations mettent en évidence les personnes susceptibles d'être impliquées dans la cyberintimidation et identifient les populations clés qui pourraient nécessiter un soutien accru dans les programmes de prévention ou d'intervention. Ces constatations préliminaires indiquent la nécessité de poursuivre les recherches sur la relation entre les données démographiques familiales et la cyberintimidation, ce qui pourrait être utile pour la conception et la mise au point d'interventions ciblées.
Cet examen a mis en évidence plusieurs facteurs de protection liés à la famille qui pourraient aider les enfants et les jeunes à augmenter leur résilience et leurs stratégies d'adaptation à la cyberintimidation, ainsi que des facteurs de risque qui pourraient augmenter la probabilité de comportements de cyberintimidation. Ces facteurs de protection et de risque fournissent des indications utiles sur les domaines à cibler dans les futures initiatives de prévention et d'intervention en matière de cyberintimidation. Les principaux facteurs de protection contre la cybervictimisation et la cyberintimidation étaient les suivants : sensibilisation des parents aux comportements en ligne, perception du soutien de la famille et des structures sociales élargies, médiation instructive (surveillance parentale, tutelle en ligne), attachement parental positif et style de parentage encadrant.
Dans l'ensemble, les facteurs de risque de cybervictimisation et de cyberintimidation étaient les suivants : absence de médiation parentale ou médiation incohérente, violence et conflits familiaux, faible attachement parental et solitude familiale, faible soutien social, styles de parentage autoritaires et adoptant une attitude de de laisser‑faire, familles à faible revenu, monoparentales ou recomposées.
Cette analyse documentaire a aussi permis de constater que les programmes de prévention et d'intervention en matière de cyberintimidation ont été mis en place exclusivement dans les écoles, avec peu ou pas de participation de la part des parents. Aucun des programmes trouvés dans cette analyse documentaire n'était spécifiquement axé sur les familles ou conçu pour elles. Les composantes familiales se caractérisent essentiellement par une participation passive de la famille, axée sur les activités d'acquisition de connaissances et d'accroissement de la sensibilisation. Aucune étude n'a évalué les effets uniques de la composante familiale. Il n'est donc pas possible d'évaluer l'efficacité de cette dernière dans ces programmes. L'analyse documentaire met en évidence le rôle critique des familles dans la cyberintimidation. Pourtant, à ce jour, il n'existe pas d'études de prévention ou d'intervention fondées sur des données probantes qui se concentrent sur les familles ou qui évaluent les effets additifs d'une composante familiale.
Incidences
Cette littérature met en évidence les rôles directs et indirects des familles sur la cyberintimidation dans le contexte d'un monde numérique toujours plus présent et croissant. Ce qui ressort de la recherche, c'est la littérature sur les principaux domaines du fonctionnement parental et familial qui sont liés à l'implication dans la cyberintimidation et les facteurs de risque et de protection connexes que les programmes de prévention et d'intervention familiale devraient cibler.
La littérature souligne également les lacunes dans la sensibilisation générale des familles et leur compréhension des comportements de cyberintimidation, ainsi que le manque d'initiatives et de stratégies actuelles et proposées pour impliquer activement les familles dans la prévention et l'intervention en matière de cyberintimidation. À l'heure actuelle, les programmes de prévention et d'intervention qui existent ne sont pas spécifiquement conçus pour reconnaître le rôle central que jouent les familles et se limitent donc à des activités très passives telles que des ateliers pour les aidants, des brochures, etc.
Cette analyse a également mis en évidence l'existence de facteurs de risque communs et spécifiques à la cyberintimidation et à la cybervictimisation. En ciblant les facteurs de risque et de protection communs, les deux comportements problématiques peuvent être réduits.
Sources
Maxwell, E., Khanna, N., et Craig, W. (2021). Examen des populations clés dans le contexte de la mise en œuvre d'initiatives de prévention et d'intervention en matière de cyberintimidation. Analyse documentaire sur le rôle de la famille (2023-R005). Sécurité publique Canada.
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Les résumés de recherche sont produits pour le Secteur de la prévention du crime de Sécurité publique Canada. Le présent résumé se veut l'interprétation des constatations des auteurs du rapport et ne correspond pas nécessairement à celles du ministère de la Sécurité publique du Canada.
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