Sommaire de recherche
Transitions de la délinquance juvénile vers la criminalité au début de l’âge adulte : Examen de la situation au Canada et à l’international
Contexte
Les données déclarées par la police montrent que les jeunes adultes appartenant au groupe d’âge 18‑24 ans affichent les taux d’infractions criminelles les plus élevés au Canada. En 2014, plus de 183 000 jeunes adultes ont été accusés de crimes par la police, ce qui représente 5 428 personnes par tranche de 100 000 jeunes adultes. En comparaison, le nombre d’accusés chez les jeunes âgés de 12 à 17 ans (4 322) et de 25 à 29 ans (4 712) était moins élevé. Il faudra donc accorder la priorité à la réduction de la délinquance chez les jeunes adultes, ce qui pourrait avoir une grande incidence sur le taux de criminalité global.
Il est essentiel de comprendre pourquoi les délinquants juvéniles continuent à commettre des infractions quand ils deviennent de jeunes adultes, et de recommander les moyens les plus efficaces de prévenir la persistance de la délinquance au début de l’âge adulte.
Méthode
Le rapport examine en détail les études longitudinales les plus pertinentes menées au Canada et mentionne brièvement certaines des constatations les plus pertinentes découlant d’études longitudinales menées dans d’autres pays. On a effectué une étude longitudinale en commençant par les années d’adolescence jusqu’au moins l’âge de 24 ans parce qu’en vertu du droit canadien, les dossiers des mineurs sont supprimés au terme d’une certaine période. Ainsi, si l’on entame les études par un échantillon composé d’adultes, on ferait abstraction d’un grand nombre d’infractions commises par des délinquants juvéniles. Les études longitudinales basées sur des échantillons communautaires étaient préférables à celles fondées sur des échantillons de délinquants parce que des échantillons initialement constitués de non-délinquants permettaient d’extraire naturellement des échantillons représentatifs de délinquants, et que l’on pouvait ainsi déterminer avec plus d’exactitude la prévalence de la délinquance juvénile.
La revue de la littérature a permis de répondre à des questions clés relatives à la transition de la délinquance juvénile vers la criminalité au début de l’âge adulte.
Les questions clés sont les suivantes :
- Quelle proportion de délinquants juvéniles jusqu’à l’âge de 17 ans deviennent de jeunes délinquants adultes entre 18 et 24 ans?
- Dans quelle mesure observe-t-on une continuité dans les types de crimes, plutôt qu’une diversité des infractions commises?
- Dans quelle mesure peut-on prédire la probabilité de persistance de la délinquance au début de l’âge adulte en se basant sur le profil de la carrière criminelle?
- Dans quelle mesure peut-on prédire les différents aspects de la carrière criminelle d’un jeune adulte à partir des infractions commises à l’adolescence, par exemple la fréquence des infractions, la durée de la carrière criminelle et le coût des infractions?
- Dans quelle mesure peut-on prédire la probabilité de persistance de la délinquance au début de l’âge adulte en se basant sur les facteurs de risque et de protection antérieurs?
- Dans quelle mesure les résultats varient-ils selon le genre, l’origine ethnique/nationale et les différents contextes locaux ou provinciaux?
Constatations
Des études longitudinales menées au Canada et à l’international montrent que : (1) les délinquants juvéniles condamnés sont beaucoup plus susceptibles que ceux qui n’ont pas été condamnés comme délinquants juvéniles d’être reconnus coupables d’infractions comme jeunes adultes; et (2) la majorité des délinquants juvéniles reconnus coupables seront condamnés de nouveau comme jeunes adultes. L’impulsivité précoce, les compétences parentales faibles, les facteurs de stress familiaux, la séparation de l’enfant et des parents, les fréquentations antisociales et les attitudes antisociales permettent de prédire la persistance de la délinquance. Les délinquants autochtones sont relativement plus susceptibles de persister dans la délinquance au début de l’âge adulte que les délinquants non autochtones, et les facteurs de risque de la persistance sont relativement différents pour les délinquants autochtones et non autochtones. Les problèmes financiers et les pairs antisociaux sont d’importants facteurs de risque chez les jeunes délinquants autochtones.
Si les études internationales révèlent que la probabilité de persistance chez les jeunes adultes augmente avec le nombre d’infractions commises avant la majorité, les études canadiennes tirent des conclusions mitigées quant à savoir si l’apparition de la délinquance à un jeune âge permet de prédire la persistance de la délinquance au début de l’âge adulte. Il faudra mener davantage de recherches sur la valeur prédictive des infractions commises plus ou moins tard pendant les années d’adolescence.
Les études longitudinales menées au Canada et à l’international montrent que le coût de la délinquance juvénile permet de prédire le coût de la délinquance au début de l’âge adulte au chapitre des services correctionnels liés aux décisions rendues, mais pas des coûts liés aux victimes.
Répercussions
Au Canada, davantage de recherches sont requises pour évaluer dans quelle mesure l’apparition de la délinquance à un jeune âge permet de prédire la persistance de la délinquance au début de l’âge adulte, et dans quelle mesure un type particulier d’infractions commises à un jeune âge permet de prédire un type particulier d’infractions à l’âge adulte. Il faudra également mener davantage d’études canadiennes sur les facteurs de risque et les outils d’évaluation des risques/besoins qui permettent de prédire la persistance de la délinquance, mais plus particulièrement sur les facteurs de protection permettant de prévenir la continuation du comportement délinquant à l’âge adulte. Enfin, il manque des recherches sur les infractions autodéclarées, la délinquance chez les femmes, la délinquance chez les Autochtones et la prévision des coûts de la carrière criminelle des jeunes adultes.
Il serait utile d’analyser de nouveau les études longitudinales canadiennes afin de mieux comprendre la transition de la délinquance juvénile vers la criminalité au début de l’âge adulte. Idéalement, il faudrait mener une nouvelle étude longitudinale sur l’évolution de la délinquance au Canada, de préférence dans une grande ville. L’on pourrait aussi recueillir des renseignements sur la délinquance dans le cadre d’une étude longitudinale canadienne existante qui porte sur les enfants et les jeunes.
Recommandations
Au Canada, il faudrait mettre en œuvre des programmes efficaces afin de prévenir la transition de la délinquance juvénile vers la criminalité au début de l’âge adulte. On pourrait aussi mettre à l’essai de nouvelles méthodes pour traiter les cas des jeunes délinquants adultes. Voici quelques possibilités : (1) augmenter l’âge minimal de comparution devant les tribunaux pour adultes; (2) appliquer un « rabais pour des raisons de maturité » aux jeunes délinquants adultes, en leur imposant des sanctions moins sévères si leur jugement témoigne de leur immaturité; (3) créer des tribunaux spéciaux pour les jeunes délinquants adultes; (4) créer des établissements correctionnels spéciaux pour les jeunes délinquants adultes; et (5) recourir au dépistage et à l’évaluation des risques/besoins des jeunes délinquants adultes, afin d’évaluer leurs facteurs de risque et de protection ainsi que leurs fonctions d’exécution.
Source
- Farrington, D. P. (2017). Transition de la délinquance juvénile vers la criminalité au début de l’âge adulte : Examen de la situation au Canada et à l’international. Ottawa : Sécurité publique Canada.
Sources additionnelles
- Farrington, D. P. (2017). Transition de la délinquance juvénile vers la criminalité au début de l’âge adulte : Examen de la situation au Canada et à l’international – Résumé de recherche. Ottawa : Sécurité publique Canada
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Les sommaires de recherche sont produits pour le Secteur de la sécurité communautaire et de la réduction du crime, Sécurité publique Canada. Les opinions exprimées dans le présent sommaire sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement celles de Sécurité publique Canada.
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