Atelier sur la traite de personnes Rapport sommaire
Table des matières
- 1 Remerciements
- 2 Contexte
- 3 Aperçu et objectif
- 4 Conclusions importantes et recommandations proposées
- 4.1 Secteur des services
- 4.1.1 Devoir se battre pour répondre aux besoins des victimes
- 4.1.2 Manque de soutiens officiels dans le continuum de soins
- 4.1.3 Manque d'uniformité dans les services/accessibilité dans les territoires de compétences
- 4.1.4 Écarts sur le plan du langage en lien avec la traite de personnes
- 4.1.5 Manque de maisons sécuritaires pour les victimes
- 4.1.6 Autres recommandations
- 4.2 Recherche et collecte de données
- 4.2.1 Absence de collecte de données et amélioration de la méthodologie
- 4.2.2 Manque de partage de l'information et de collaboration
- 4.2.3 Absence de recherches et d'un calendrier de recherche
- 4.3 Sensibilisation et formation
- 4.3.1 Manque de sensibilisation sur la question de la traite de personnes au Canada
- 4.3.2 Recommandations aux fins d'amélioration
- 4.4 Coordination et collaboration nationales
- 4.4.1 Absence de réponse cohérente à l'échelle nationale
- 4.4.2 Réforme et application de la loi
- 4.4.3 Permis de séjour temporaire (PST)
- 4.4.4 Recommandations supplémentaires
- 5 Action collective
- 6 Prochaines étapes
26 et 27 mars 2015
Remerciements
Sécurité publique Canada (SP) souhaite profiter de l'occasion pour remercier les personnes et les organisations qui ont participé à l'atelier sur la traite de personnes, d'une durée de deux jours, de leur dévouement à la lutte contre cette activité illégale tant au Canada qu'à l'étranger. La collaboration, les partenariats et la sensibilisation découlant de l'atelier complètent les engagements pris dans le cadre du Plan d'action national de lutte contre la traite de personnes, afin de poursuivre et soutenir des efforts novateurs pour lutter contre la traite de personnes. L'information et les recommandations issues des discussions qui ont eu lieu vont documenter les priorités fédérales au moment où le gouvernement fédéral cherche à miser sur les efforts déployés actuellement pour agir contre la traite de personnes.
Contexte
Le 6 juin 2012, Sécurité publique Canada (SP) a lancé le Plan d'action national de lutte contre la traite de personnes (PAN) qui s'engage à verser approximativement 25 millions de dollars sur quatre ans dans le cadre d'initiatives contre la traite de personnes. Les rapports annuels sur les progrès accomplis relativement au PAN qui comprennent le Rapport annuel sur les progrès accomplis 2012-2013Footnote1 publié en décembre 2013, et le Rapport annuel sur les progrès accomplis 2013-2014Footnote2 publié en mai 2015, parle des progrès que le gouvernement du Canada a réalisés dans les quatre piliers de la démarche Footnote3 : la prévention de la traite de personnes, la protection de ses victimes, la poursuite des délinquants et les partenariats. En plus de préciser les progrès réalisés en ce qui concerne les engagements, le rapport annuel met en évidence les prochaines étapes, orientées par les consultations annuelles auprès des intervenants.
Le gouvernement du Canada reconnaît que la clé du succès à long terme du PAN est la communication et la collaboration avec les intervenants et les experts qui jouent un rôle unique et essentiel dans la lutte contre ce crime et sa prévention. C'est pourquoi, dans le cadre du PAN, SP s'est engagé à collaborer de diverses façons avec des intervenants et des experts des quatre coins du Canada, y compris des partenaires à l'étranger, pour en apprendre plus au sujet de la situation de la traite de personnes et pour cerner les possibilités actuelles d'action et de collaboration.
À cette fin, depuis l'automne 2012, SP a mené un certain nombre de consultations auprès d'intervenants clés. Le Rapport sommaire sur les Consultations avec des groupes d'intervenants sur la traite de personnes 2012-2013Footnote4 et le Rapport sommaire sur le Forum national sur la traite de personnes 2014Footnote5 résument les thèmes, à l'échelle régionale et nationale, les principales conclusions et les recommandations découlant de ces consultations.
Aperçu et objectif
Les 26 et 27 mars 2015, douze intervenants, la plupart des organismes non gouvernementaux (ONG) et des fournisseurs de services mobilisés dans la lutte contre la traite de personnes ont rencontré à Ottawa des membres du Groupe de travail sur la traite de personnes (GTTP) et de ministères fédéraux. L'objectif de l'atelier consistait à faire le point sur les activités mentionnées dans le Plan d'action national de lutte contre la traite de personnes, d'en établir l'ordre des priorités et de les faire progresser tout en cernant aussi les problèmes émergents et les occasions favorables. De plus, l'atelier visait à entretenir et à renforcer les relations entre les intervenants et les décideurs, s'assurant ainsi que le Plan d'action national répond aux besoins de tous.
S'appuyant sur des consultations préalables, l'atelier donnait la chance d'échanger des informations, de déterminer les problèmes émergents, les solutions possibles et les occasions favorables, et d'en discuter. Les discussions ont porté sur les éléments suivants : examen des recommandations du Rapport du Groupe de travail national sur la traite des femmes et des filles à des fins sexuelles au Canada intitulé « C'est assez, Mettons fin à la traite sexuelle au Canada » (en particulier le chapitre 8 sur l'action collective).
Le Rapport sommaire sur l'atelier 2015 sur la traite de personnesFootnote6 résume les thèmes, les principales conclusions et les recommandations découlant de l'atelier de mars 2015 sur la traite de personnes. L'information recueillie, soutenue par les conclusions des consultations précédentes, servira à étayer les priorités et politiques futures de la lutte fédérale contre la traite de personnes.
Présentations
Plan d'action national de lutte contre la traite de personnes du Canada de Sécurité publique Canada;
M. Michael Holmes, Directeur de la Division des crimes graves et du crime organisé, Sécurité publique Canada, a présenté un aperçu de la traite de personnes au Canada et du Plan d'action national (PAN) pour lutter contre la traite de personnes. M. Holmes a également souligné les progrès indiqués dans le premier rapport annuel sur les progrès accomplis par rapport au PAN, y compris les étapes suivantes.
À l'avenir, pour la période 2014-2015, le gouvernement du Canada :
- Fournira jusqu'à 500 000 $ annuellement (un financement qui a commencé en 2013-2014) pour les projets visant à améliorer les services et les soutiens aux victimes par le biais du Fonds d'aide aux victimes.
- Continuera à s'engager auprès de la communauté se consacrant à la traite de personnes par le biais d'appels réguliers et de forums Web.
- Publiera une étude de recherche sur la traite de travailleurs et un rapport d'étude exploratoire sur les questions et les tendances se rapportant à la traite de femmes et filles autochtones, incluant la traite des familles et la participation des gangs et des organisations criminelles.
- Explorera les occasions de travailler avec les provinces et les territoires afin de développer des programmes de formation à l'intention des agents responsables des normes d'emploi et de la santé et à la sécurité au travail.
- Explorera la gestion de l'approvisionnement et de la chaîne de distribution du gouvernement pour ce qui est de la traite de personnes.
Groupe de travail national sur la traite des femmes et des filles à des fins d'exploitation sexuelle au Canada
Mme Diane Redsky, présidente du Groupe de travail national sur la traite des femmes et des filles à des fins d'exploitation sexuelle au Canada (Ma Mawi Wi Chi Itata Centre Inc.), a fait une présentation sur les activités et les réalisations du Groupe de travail depuis 2011. La Fondation canadienne des femmes a créé ce groupe de travail national qui rassemble 24 experts provenant des quatre coins du Canada afin d'étudier la question de l'exploitation sexuelle. Il a pour but de participer à une recherche en vue de collecter des données sur l'exploitation sexuelle. Le groupe de travail s'est rendu à dix sites à travers le Canada et a rencontré 260 organismes et 160 survivantes. De ces 260 organismes, 45 ont participé à la table ronde nationale avec des fournisseurs de services et des survivantes. Cette table ronde a été suivie d'une série d'activités de recherche, notamment :
- un sondage en ligne à l'échelle nationale;
- un sondage d'opinion publique Angus Reid à l'échelle nationale;
- une recherche commanditée et des subventions totalisant 800 000 $.
Cette recherche s'est concrétisée par la publication d'un rapport comprenant 34 recommandations. Pour voir le rapport et ses recommandations, veuillez cliquer ici.
Conclusions importantes et recommandations proposées
Les conclusions importantes qui résultent de l'atelier (comprenant les lacunes et les défis actuels ainsi que les thèmes émergents) et certaines recommandations proposées sont présentées ci-dessous. Pour en faciliter la consultation, les renseignements ont été regroupés selon les thèmes suivants : Secteur des services; Recherche et collecte de données; Sensibilisation et formation; Coordination et collaboration nationales.
Secteur des services
L'importance de répondre aux besoins des victimes
Il est préoccupant que certains services existants offerts au Canada ne soient pas adaptés aux besoins actuels des victimes. Ces lacunes comprennent les services se rapportant aux problèmes de santé mentale non traités, le besoin de services supplémentaires pour les cas de traumatisme, un programme national de désintoxication et de stabilisation s'adressant aux femmes et aux filles ayant été victimes d'exploitation sexuelle, et le manque de capacité et de ressources en refuges pour venir en aide aux victimes.
Recommandations : On a relevé des besoins de renforcer la capacité et les ressources dans le secteur des services afin de mieux répondre aux besoins des victimes.
Soutiens officiels dans le continuum de soins
On a relevé de nombreux problèmes en ce qui a trait au manque de soutiens officiels dans le continuum de soins. Certains de ces problèmes se rapportent au manque de services connexes et à l'absence d'un point central discernable pour aider les gens à progresser à travers les systèmes. Une tendance s'est dessinée, à savoir que les victimes qui ont été traitées et ont progressé dans le processus reviennent ultérieurement chercher du soutien. Les survivantes peuvent être amenées à rechercher du soutien plus tard dans la vie, sous l'influence de divers facteurs comme une grossesse, une certaine confusion dans la reconnaissance de limites dans les relations, etc. La compréhension du concept de continuum des soins doit changer.
Recommandations : Il est recommandé d'adopter une approche axée sur des services irréprochables pour soutenir les victimes. Par exemple, un système dans lequel une personne bénéficie de services au fur et à mesure qu'elle progresse dans le système, la mise en place de protocoles (p. ex. des protocoles d'échange de renseignements) afin d'assurer la continuité.
Uniformité dans les services/accessibilité dans les territoires de compétences
On relève des disparités régionales à travers le pays pour ce qui est du type et du niveau de services et de ressources disponibles pour les victimes. Par exemple, certains organismes ne sont pas en mesure de fournir des services à l'automne parce qu'ils se concentrent sur la recherche de refuges pour l'hiver.
Recommandations : L'élaboration d'une législation homogène et de stratégies de prestation de services est de la plus haute importance afin d'assurer que les victimes bénéficient de services et d'un soutien homogènes, à l'échelle nationale, indépendamment du lieu où ils se trouvent. Par ailleurs, il faut développer une carte géographique des centres de soins pour les victimes qui peuvent être fournies dans tous les territoires de compétences au pays.
Une définition plus large de la traite de personnes
Il faut accorder une considération particulière à l'amélioration de la définition de traite de personnes afin qu'elle soit plus inclusive en vue d'améliorer l'efficacité et l'application des lois et des services ainsi qu'empêcher l'ostracisme de certaines victimes et survivantes (p. ex. l'usage des pronoms dans la communauté LGBTQ, le langage utilisé avec les travailleurs et travailleuses du sexe).
Recommandations : Il est important d'appliquer des définitions plus élargies de la traite de personnes (p. ex. critères et technique de Delphi) et non le code criminel pour la prestation de services.
Maisons sécuritaires pour les victimes
Au Canada, il y a un manque de maisons sécuritaires. Les refuges peuvent représenter une bonne solution, mais tous ne sont pas équipés de manière à soutenir les victimes ayant des problèmes de dépendance ou celles qui craignent pour leur sécurité.
Autres recommandations
Continuer à créer des initiatives dirigées par des survivantes
Ce type d'initiatives est axé sur les services aux victimes, la sensibilisation du public et sont des points d'ancrage dans les efforts déployés pour lutter contre la traite de personnes. On a souligné l'importance qu'il y a d'associer la prestation de services à des critères de réussite. Il est important de continuer à établir des normes de prestation de services, notamment :
- Soutenir les femmes et les filles et mettre des femmes expérimentées au centre.
- Prestation de services informés en matière de traumatisme.
- Collaboration – offrir un service holistique.
- Rester pertinents quant aux changements en matière de traite de personnes.
- Maintenir le cap sur les priorités à long terme.
Besoin d'accroître le réseautage et la collaboration
Les occasions de réseautage et de partage de l'information peuvent contribuer à développer la capacité. Par exemple, soutenir les occasions d'apprentissage entre les provinces dans un effort de prendre des mesures et créer des changements positifs; maintenir et motiver la collaboration et le travail en étant axé sur le changement des systèmes; protocoles nationaux, promettre des pratiques axées sur la collaboration avec la police et la Children's Aid Society, etc.
Une autre approche visant à assurer un réseautage et une collaboration efficaces consiste à améliorer la représentation des comités sur la traite de personnes au niveau fédéral, provincial et territorial en incluant la représentation de quatre (4) groupes clés :
- Les systèmes de première ligne (p. ex. santé, maintien de l'ordre, etc.)
- Les ONG (p. ex. organismes de services aux femmes et aux jeunes)
- Les communautés à risque (p. ex. les immigrants, les réfugiés, les Autochtones)
- Les survivantes
Recherche et collecte de données
La collecte de données et amélioration de la méthodologie
Des lacunes importantes ont été relevées pour ce qui est de la collecte de données, voire l'absence de collecte de données. Actuellement, la collecte de données dépend d'organismes non gouvernementaux (ONG). Cependant, il y a un manque de données administratives des ONG et un manque d'infrastructure pour la collecte de ces données ainsi qu'un roulement du personnel élevé. La majorité des données disponibles portent sur des statistiques de poursuites.
Recommandations : Il faut poursuivre avec les efforts gouvernementaux en matière de collecte de statistiques et de données, afin de dresser une carte des méthodes utilisées par le crime organisé et la participation à la traite de personnes et les évaluations de la menace effectuées par la GRC.
Manque de partage de l'information et de collaboration
On a relevé un besoin d'améliorer l'échange de l'information, incluant le partage des connaissances pour ce qui est de la réalisation de changements systémiques.
Recommandations : Les facteurs suivants doivent être pris en compte :
- Des incitatifs financiers pour les ONG pour qu'ils soumettent des données et des occasions de collaboration afin de fournir du perfectionnement professionnel pour les services de soutien en vue d'effectuer une collecte de données plus efficace (dans certains cas, de commencer à procéder à une collecte).
- Des occasions de collaboration afin de développer une plateforme de données centralisées pour les services de soutien. Par exemple, en Saskatchewan il existe un protocole d'échange de l'information, qui a le potentiel de devenir un modèle de plateforme.
- Élaborer un ou des outils pour la collecte de données à l'échelle nationale aux fins d'utilisation par la société civile (incitante à utiliser). Une forme de collecte de données normalisées et accessibles qui est facile et incitante à utiliser. Déterminer une terminologie commune pour collecter et évaluer les données.
- Besoin d'un incitatif pour stimuler les personnes qui travaillent sur ce dossier et les rassembler. Se mettre en relation avec d'autres groupes qui collectent de l'information.
- Souligner les pratiques exemplaires en ce qui a trait à l'échange de l'information.
- Cerner de manière continue les lacunes dans les pratiques relatives à l'échange de l'information, dans l'optique de les combler.
Absence de recherches et d'un calendrier de recherche
Il y a un manque de consensus entre les intervenants dans le domaine de la traite de personnes pour ce qui est des priorités à accorder à la recherche. L'autre aspect problématique concernant la recherche se rapporte au manque de financement disponible pour appuyer ces efforts, ce qui entrave la recherche relative à la traite de personnes, tant sur le plan de la quantité que de la qualité.
Recommandations : Il faut veiller à créer un cadre de travail partagé en matière de recherche. Il y a un besoin démontré de coordonner la recherche à l'échelle nationale afin de mieux comprendre les nombreux facteurs (c.-a-d. les facteurs de risque) entrant en ligne de compte dans la traite de personnes. Il faut qu'il y ait une collaboration structurée et soutenue entre les universitaires étudiant la traite de personnes et les ONG en première ligne afin de mieux soutenir le développement et le maintien d'une méthodologie commune en matière de recherche et de collecte de données. Il faut également prendre en considération la détermination des coûts de la traite de personnes et de l'exploitation sexuelle et le retour sur investissement et les coûts de la violence (traite de personnes axée sur l'exploitation sexuelle).
Sensibilisation et formation
Manque de sensibilisation sur la question de la traite de personnes au Canada
La traite de personnes reste une question relativement méconnue au Canada. Il y a, de manière générale, un manque de conscience du fait que la traite de personnes à des fins d'exploitation sexuelle est d'actualité au Canada. Cependant, ceux qui en ont conscience considèrent que la question touche des personnes provenant de l'étranger. Il faut éveiller les consciences en ce qui concerne la portée et l'étendue de la question.
Les situations en matière de traite de personnes sont complexes et dynamiques – dans certains cas, les victimes sont prises au piège d'une exploitation à la fois sexuelle et économique. Il faut cibler le manque de compréhension actuel en ce qui concerne les complexités de l'exploitation sur le plan du travail, qui peut s'avérer tout autant traumatisante et s'étend souvent à l'exploitation sexuelle.
Dans certains cas, les subtilités sont très particulières. Parfois, la personne pratiquant la traite de personnes se trouve dans un autre pays et exerce un contrôle sur les victimes par la contrainte. Par exemple, les maris qui exercent une contrainte sur leurs familles ou des familles venant au Canada sous prétexte de poursuivre des études.
Recommandations aux fins d'amélioration
Développer des campagnes nationales de sensibilisation du public
Il faut développer une campagne nationale de sensibilisation du public afin de sensibiliser la population à la question de la traite de personnes et d'étayer le soutien aux programmes et services en la matière. Il a également été recommandé d'augmenter le nombre de campagnes de sensibilisation publique d'envergure nationale qui ont des répercussions à l'échelle régionale.
Améliorer les programmes de formation en matière de traite de personnes
Il faut approfondir et améliorer les programmes de formation. Par exemple, la suggestion a été mise de l'avant proposant des cours sur la traite de personnes s'adressant aux juges et avocats de la Couronne, une formation à l'intention du personnel travaillant dans tous les secteurs (ONG, gouvernement, société civile, secteur des priorités) qui travaillent sur des dossiers de traite de personnes à tous les niveaux, continuer à développer des programmes de formation qui ciblent les agents et intervenants clés du système, élaborer et offrir de meilleures programmes d'éducation aux jeunes.
On relève un besoin de formation disponible pour le système judiciaire qui a le pouvoir de relayer les messages par le biais des décisions qui sont rendues. Par exemple, récemment un juge a suggéré aux avocats de la Couronne de ne pas utiliser un certain hôtel pour héberger les témoins parce qu'il avait servi dans le cadre de la traite de personnes. La « formation » sur la traite de personnes à l'intention des juges et avocats de la Couronne devrait être intégrée dans un plus large contexte incorporant des commentaires de la collectivité à l'intention de ces décideurs importants – une manière pour eux d'avoir régulièrement de la rétroaction de leur public.
L'accent devrait être mis sur la sensibilisation et la prestation de formation à l'intention de la communauté professionnelle médicale.
Il faut poursuivre les programmes de formation et de sensibilisation auprès des services d'application de la loi de première ligne. On a souligné l'importance de poursuivre le financement des efforts déployés en matière d'éducation et de formation pour le public, les services d'application de la loi et les partenaires gouvernementaux. Il reste beaucoup de travail à faire concernant la formation et la sensibilisation auprès des employeurs de l'industrie des services. L'importance de poursuivre le développement des programmes de formation, à savoir une formation complète, actualisée et gratuite portant sur la traite de personnes a également été mise de l'avant – p. ex. le Bureau de lutte contre la traite des personnes de la C.‑B.
Le besoin de soutenir les programmes d'éducation des jeunes par des pairs
L'importance de soutenir les programmes d'éducation des jeunes par des pairs, comme le programme Children of the street en Colombie-Britannique a également été souligné. Il s'agit d'un programme modèle où les jeunes s'adressent aux jeunes et qui vise les jeunes de la 5e année à la 12e année. Les secteurs à cibler seraient les suivants : des stratégies de prévention ciblant particulièrement les jeunes à risque; le soutien pour l'échange d'information entre pairs (p. ex. des organismes comme MADD dans les écoles et portant sur des sujets comme la traite de personnes); ainsi que la création d'un réseau de soutien national pour les jeunes. Il faut également prendre en considération l'élaboration d'un plan d'éducation des jeunes pour les écoles publiques. L'importance d'utiliser des outils novateurs comme le nouveau jeu sur ordinateur « Get Eddy » conçu pour que les professeurs et les étudiants jouent ensemble a aussi été soulignée. Il a également été mentionné qu'il fallait augmenter le nombre de programmes créatifs pour les jeunes Autochtones. L'éducation doit se concentrer sur les points suivants : développer la confiance chez les filles et les jeunes femmes, enseigner le respect aux garçons et aux jeunes hommes, y compris la notion de consentement, enseigner aux jeunes ce qu'est une sexualité saine et ce que sont de saines relations. La recommandation a été faite dans le but d'examiner le Fourth R Program: Strategies for Healthy Youth Relationships (Programme des 4 R : stratégies pour de saines relations chez les jeunes) de la Western University.
Examiner les options afin de rendre obligatoire pour les jeunes (de 12 à 18 ans) la participation à des travaux bénévoles (législation provinciale par le biais de l'enseignement pour des crédits scolaires) et les encourager à faire du bénévolat dans des organismes œuvrant dans le domaine de la traite de personnes : être exposé aux problèmes signifie y être sensibilisé. Continuer à analyser l'exposition des jeunes à la pornographie en ligne et leur attitude à cet égard et le lien avec les modèles d'exploitation sexuelle.
Coordination et collaboration nationales
Absence de réponse cohérente à l'échelle nationale
Les relations entre les organismes gouvernementaux au niveau fédéral, provincial et territorial présentent des lacunes ou sont inexistantes (p. ex. le bureau de conseils pour les travailleurs étrangers temporaires [TET] n'existe pas en Ontario).
Recommandations : Une action à l'échelle du Canada est requise, par exemple, un protocole national/la promesse de collaboration avec la police et la Children's Aid Society (CAS). Par ailleurs, un calendrier de politique à long terme et une plus grande ouverture à des idées et paradigmes différents en matière de politique sont requis.
Réforme et application de la loi
Le projet de loi C-36 criminalise l'achat de services sexuels, mais l'application n'est pas homogène au niveau des organismes de police à l'échelle du Canada. Dans l'ensemble, les intervenants constatent une recrudescence des activités policières et l'application de lois qui n'existaient pas auparavant. On remarque une augmentation des condamnations et plus de cas sont portés devant la justice et des peines plus lourdes sont prononcées.
Recommandations : Une application de la loi accrue au niveau municipal a été recommandée. Elles peuvent se concentrer sur les points suivants : assurer le financement de la défense des intérêts, faire participer les chefs de police et les maires et les former par le biais de l'Association canadienne des commissions de police.
En outre, les changements à la législation sont très importants; il faut avoir des lois qui arrêtent le trafic de personnes dès le début. Par exemple, établir des règlements administratifs municipaux clés et en matière d'éducation (p. ex. Saskatoon a annulé la décision d'autoriser l'effeuillage dans les bars).
Permis de séjour temporaire (PST)
Le processus de PST a besoin d'amélioration. La question de l'accès a été soulevée; il est difficile d'accéder au processus de PST ou bien parce qu'un trafiquant a forcé une victime à se plier à des conditions criminelles, ou parce qu'il y a un manque de connaissance à Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) sur cette question et sur la procédure d'émission des PST.
Recommandations : Des recommandations ont été émises pour assurer la formation du personnel de CIC et de l'ASFC concernant les PST et les relations avec les ONG dans toutes les provinces afin de faciliter le processus d'émission. Les suggestions suivantes ont également été faites : se conformer aux critères du Protocole de Palerme, ancrer les PST dans la loi, inclure les membres de la famille dans le processus et suivre une voie plus directe menant à la résidence permanente.
Recommandations supplémentaires
Compensation par le biais de confiscations civiles
Il faut prendre en considération la compensation des victimes (non pas sous la forme d'indemnisation provinciale, mais plutôt en accordant aux victimes l'argent qui leur a été spolié par victimisation). Lorsque l'État saisit des actifs, certains pourraient servir à indemniser les victimes. Cependant, il a été reconnu qu'il pouvait y avoir des problèmes pour ce qui est de la mise en application. Il n'existe actuellement aucune possibilité d'utiliser les biens saisis, mais il y a un précédent dans le code criminel.
Système de protection de l'enfance
Les survivantes ont indiqué que les systèmes avec lesquels elles ont interagi le plus lorsqu'elles étaient victimes de la traite durant leur enfance étaient : 1) L'école, 2) Le système de protection de l'enfance et 3) Les organismes communautaires. Les enfants pris en charge par le système de protection de l'enfance sont particulièrement vulnérables. La plupart des rapports proviennent de la police ou des foyers de groupe (les filles sont recrutées par d'autres filles). Par exemple, un taxi prend les filles en charge aux foyers de groupe, les emmène faire des passes et les ramène aux foyers. Les intervenants demandent que le système de protection de l'enfance soit à l'épreuve de la traite. Il faut revoir les politiques provinciales en matière de protection de l'enfance qui sont incohérentes.
Tirer avantage des programmes actuels
Il est essentiel de dresser l'inventaire des subventions et contributions disponibles pour soutenir les efforts visant à éliminer la traite de personnes afin de puiser dans les ressources existantes pour accroître la sensibilisation à la traite de personnes, s'attaquer à ce problème ainsi que coordonner les subventions et contributions disponibles afin de l'éradiquer.
Renforcer les partenariats avec les organismes non gouvernementaux (ONG)
Le gouvernement du Canada peut soutenir le développement d'un partenariat avec les ONG, la mise en place d'un réseau d'ONG travaillant en partenariat afin de promouvoir la sécurité à l'échelle nationale. Ce réseau permettrait d'éliminer une certaine concurrence qui règne entre les ONG, aiderait à les mobiliser et à collaborer dans l'atteinte d'un but commun : combattre la traite de personnes. Il faut également assurer un financement continu pour soutenir les services. Les intervenants demandent un plus grand engagement et plus de mesures au niveau provincial, particulièrement en ce qui a trait à la prestation de services et à leur amélioration. Toutefois, avant de sensibiliser le public au problème, il est important de définir à l'avance les besoins en prestation de service.
Assurer la participation du secteur privé
Actuellement, il n'existe aucun cadre de travail visant à inclure le secteur privé. Au nombre des recommandations, on comprend la sélection d'une société clé (jouissant d'une bonne réputation) qui joue le rôle de champion et l'étude des possibilités axées sur la mise sur pied d'une association nationale qui se composerait de partenaires du secteur privé qui collaboreraient afin de mettre un terme à la traite de personnes.
Améliorer le rôle du gouvernement du Canada dans le soutien des efforts de collaboration
Le gouvernement du Canada peut continuer à collaborer et à mener un dialogue ouvert avec les intervenants, par exemple de la manière suivante : faciliter les rencontres et les ateliers qui rassemblent les parties prenantes, mener des séances portant sur la prise d'inventaire, financer les échanges d'apprentissage entre les gouvernements au niveau fédéral, provincial et municipal avec les ONG, amener les partenaires provinciaux à la table de négociation dans le cadre de réunions du groupe de travail fédéral sur la traite de personnes, partager les connaissances et le savoir-faire à propos des changements systémiques. Le gouvernement peut également contribuer à renforcer la collaboration entre les partenaires qui travaillent sur des problèmes similaires dans le but d'accroître l'efficacité des programmes existants. Le gouvernement du Canada continue de soulever des questions touchant plusieurs administrations ou de souligner les lacunes existantes avec d'autres niveaux de gouvernement. Il peut promouvoir, mettre en place et soutenir des mesures à l'échelle du Canada.
Action collective
Le gouvernement du Canada peut envisager la participation d'autres secteurs clés : les philanthropes et le secteur privé afin d'aider à fournir les services qui manquent. En diffusant des rapports tels que le rapport « C'est assez, Mettons fin à la traite sexuelle au Canada » et le rapport du Groupe de travail national sur la traite des femmes et des filles à des fins d'exploitation sexuelle au Canada, le gouvernement du Canada contribue à attirer l'attention sur le problème et à renforcer les capacités au sein des ministères fédéraux et entre ces derniers.
Mme Kim Pate, directrice exécutive de l'Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry (ACSEF), a présenté les constatations et les recommandations contenues au Chapitre 8 : Action collective du rapport « C'est assez, Mettons fin à la traite sexuelle au Canada » récemment publié par le Groupe de travail national sur la traite des femmes et des filles à des fins d'exploitation sexuelle au Canada.
Le Groupe de travail national a été inspiré par l'approche des répercussions collectives au changement social, qui est fondée sur l'observation du fait que les problèmes complexes ne peuvent pas être résolus par un seul organisme ou une seule intervention. Au niveau national, Sécurité publique Canada a aidé à coordonner le travail entre les ministères fédéraux. Cependant, il n'y a actuellement aucun instrument en place pour coordonner les efforts de la société civile ou du secteur privé; la plupart des provinces et des régions ne disposent pas actuellement de l'infrastructure pour gérer les ressources ou coordonner les activités locales.
Pour accélérer le travail au niveau national, le groupe de travail a recommandé que quatre nouvelles tables rondes soient créées (une table ronde sur les données et la recherche, une table ronde sur la technologie, une table ronde sur la sensibilisation du public et une table ronde sur la coordination à l'échelle nationale) et que soit tenu un Sommet des femmes du milieu de la prostitution afin de soutenir la création d'un organisme qui s'exprime d'une voix forte et unique au Canada.
Le rapport recommande d'établir un Conseil des bailleurs de fonds afin de rassembler les dirigeants des différents niveaux de gouvernement, les gouvernements autochtones, les sociétés du secteur privé, les organismes communautaires, les fondations et les organisations confessionnelles afin de « trouver les bailleurs de fonds et les personnes à valeur nette élevée dans le but commun d'éradiquer le trafic de personnes à des fins d'exploitation sexuelle » afin d'assurer que les investissements sont maximisés et de fournir une orientation cohésive. Les principes relatifs aux nouveaux investissements en vue de soutenir et renforcer les effets du financement existant comprennent ce qui suit : coordonner et mettre en commun le financement ainsi que des initiatives de financement continues sur le court, moyen et long terme, faire participer les survivantes de manière significative, veiller à ce que les résultats à long terme soient évalués et améliorés par la recherche.
De même, les recommandations dans le rapport incluent le soutien à l'établissement et la maintenance d'un organe national de coordination afin de poursuivre et coordonner le travail des ONG (notamment, faire avancer les recommandations du groupe de travail et les demandes pour que soit prise en considération la manière de faire participer le secteur privé, les philanthropes et les groupes confessionnels.
Prochaines étapes
À la conclusion de l'atelier, il s'est profilé un fort intérêt pour faire avancer les choses et il a été relevé qu'il fallait déterminer les prochaines étapes à suivre pour tous les ministères et organismes, alors que l'on remarque que la force des approches systématiques est plus visible et que les relations continuent de se renforcer. Tous les joueurs clés doivent entreprendre une action collective. Sécurité publique Canada veillera à prendre des mesures stratégiques et de direction à chaque fois que cela est possible afin de soutenir l'action collective requise du système.
L'atelier a permis de cerner les prochaines étapes donnant lieu à une poursuite des discussions et éventuellement à la prise de mesures, à savoir :
- L'UCJG d'Halifax poursuit les objectifs suivants :
- Continuer à favoriser les rapports avec le Conseil consultatif sur la condition féminine de la Nouvelle-Écosse afin de financer les efforts de sensibilisation pour obtenir des services directs.
- Entretenir des liens avec Deborah's Gate.
- L'ACT Alberta va poursuivre les efforts suivants :
- Continuer à soutenir le financement de la recherche afin de mieux comprendre la traite de personnes à des fins d'exploitation de leur travail et le trafic d'organes.
- Établir des liens entre CIC Edmonton et Deborah's Gate.
- Le Programme pour les travailleurs étrangers temporaires va recourir activement aux ressources qui existent déjà afin d'améliorer la compréhension du problème par le biais de l'engagement et de la formation.
- PACT Ottawa va avoir recours au mouvement syndical – le sous-comité de PACT Ottawa participera à cette mesure afin d'évaluer la connaissance du problème auprès du mouvement syndical, ainsi que la portée et la nature du problème, et la participation du mouvement dans la défense des victimes.
- Le groupe de travail sur la traite de personnes (GTTP) va faire appel à EDSC afin de faire un compte rendu sur l'atelier sur la TP et de déterminer le niveau de sensibilisation au sein de son unité en ce qui concerne le problème de la traite de personnes.
Notes
- 1
Page Web sur la traite de personnes de Sécurité publique Canada http://www.publicsafety.gc.ca/cnt/rsrcs/pblctns/2013-ntnl-ctn-pln-cmbt-hmn/index-eng.aspx.
- 2
Page Web sur la traite de personnes de Sécurité publique Canada http://www.publicsafety.gc.ca/cnt/rsrcs/pblctns/2014-ntnl-ctn-pln-cmbt-hmn/index-eng.aspx
- 3
Page Web sur la traite de personnes de Sécurité publique Canada http://www.publicsafety.gc.ca/cnt/cntrng-crm/hmn-trffckng/index-eng.aspx.
- 4
Rapport sommaire sur les Consultations avec des groupes d'intervenants sur la traite de personnes 2012-2013 http://www.publicsafety.gc.ca/cnt/rsrcs/pblctns/2013-hmn-trffckng-stkhldr/index-eng.aspx
- 5
Page Web sur la traite de personnes de Sécurité publique Canada http://www.publicsafety.gc.ca/cnt/rsrcs/pblctns/2014-ntnl-frm-hmn-trffckng-smmry/index-eng.aspx
- 6
Les points de vue figurant dans le présent document ont été exprimés par les participants; ils ne reflètent pas nécessairement ceux du Sécurité publique Canada ou des organisations participantes.
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