Repérer et surveiller les délinquants à risque élevé

Recherche en bref
Vol. 10, No. 6
Novembre 2005

Question

Le Système national de repérage (SNR) facilite-t-il l'identification précoce et la prise en charge appropriée des délinquants que l'on juge à risque élevé de récidive violente ou sexuelle?

Contexte

Le SNR est une mesure adoptée récemment par le gouvernement du Canada pour réduire le risque que posent les délinquants qui manifestent une tendance évidente aux crimes violents ou sexuels. Cette initiative stratégique vise à dépister les délinquants considérés comme susceptibles de faire l'objet d'une demande de déclaration de délinquant dangereux (DD) ou de délinquant purgeant une peine de longue durée. Une demande de déclaration de DD acceptée par un tribunal entraîne une peine d'une durée indéterminée, alors que les délinquants purgeant une peine de longue durée se voient imposer une peine d'emprisonnement suivie d'une surveillance dans la collectivité (maximum de 10 ans). En inscrivant leur nom dans le système d'identification national de la police, les autorités sont alertées du statut des délinquants violents à risque élevé, et des mesures peuvent être prises pour présenter une demande de déclaration de DD ou de délinquant purgeant une peine de longue durée.

De 1995 à 1999 (période de l'étude), plus de 300 délinquants ont été fichés dans le système national de police à titre de « personnes d'intérêt spécial ». Avant l'étude, il existait très peu de données permettant d'évaluer l'efficacité du SNR pour le dépistage de ces délinquants jugés dangereux ou pour quelque intervention que ce soit.

Méthode

Nous avons recueilli les antécédents personnels-sociaux et criminels d'un échantillon de 256 délinquants repérés (DR). Le profil des DR a ensuite été comparé au profil d'un groupe de 97 délinquants connus pour être à risque élevé (DRE) (le groupe de DRE comprenait des DD déclarés par les tribunaux et d'autres délinquants coupables de crimes violents). Nous avons obtenu les dossiers de suivi des DR afin d'examiner leurs antécédents de récidive violente (y compris sexuelle). Nous avons insisté sur l'effet incitatif qu'a eu le SNR sur l'approbation des demandes de déclaration de DD ou de délinquant purgeant une peine de longue durée.

Réponse

L'examen des différents scores obtenus dans le cadre d'évaluations actuarielles du risque a révélé que les DR et les DRE constituaient des échantillons à risque élevé. De plus, même si l'ensemble des taux de récidive des DR étaients comparables à ceux des délinquants masculins sous responsabilité fédérale en général, les nouveaux crimes commis par les DR étaient plus graves. Les taux de nouvelles condamnations pour des crimes violents et sexuels parmi les DR libérés s'élevaient à 43,6 % et à 14,9 %, respectivement (comparativement à environ 16 % et 2 % pour les délinquants sous responsabilité fédérale typiques).

En ce qui concerne l'incidence du SNR sur le traitement des demandes de déclaration de DD et de délinquant purgeant une peine de longue durée, nous avons observé que peu de demandes étaient acceptées. Parmi les DR repérés par le SNR comme à risque élevé et violents, 22 % ont fait l'objet d'une demande de déclaration de DD ou de délinquant purgeant une peine de longue durée et 18 % ont reçu soit l'un ou l'autre type de déclaration.

Les comparaisons entre les délinquants visés par une demande de déclaration de DD ou de délinquant purgeant une peine de longue durée et ceux pour qui aucune demande n'a été présentée n'ont permis de relever que quelques différences. Par exemple, les deux groupes étaient semblables en fait d'antécédents criminels, de caractéristiques démographiques personnelles-sociales, d'évaluations actuarielles du risque et de la plupart des indicateurs de santé mentale. Donc, les raisons pour lesquelles les avocats de la Couronne n'ont pas présenté plus de demandes de DD ou de délinquant purgeant une peine de longue durée ne semblaient pas claires.

Incidences sur les politiques

Les résultats de l'étude ont révélé que la valeur pratique du SNR pourrait être améliorée en ciblant les secteurs suivants :

  1. Préciser des critères supplémentaires de repérage qui tiennent compte de ce qui est connu des DD et s'assurer que les DR ont les caractéristiques typiques des DD (p. ex. des antécédents criminels à titre de jeune contrevenant, un échec antérieur de la mise en liberté sous condition ou le trouble de la personnalité antisociale). Le critère du trouble de la personnalité antisociale peut être spécialement important pour convaincre les tribunaux de l'improbabilité d'un changement dans les comportements du délinquant.
  2. Faire comprendre aux procureurs de la Couronne à quel point ils peuvent bénéficier de l'information que les coordonnateurs du SNR ont à leur disposition, car nous ne savons pas dans quelle mesure ils réagissent de façon adéquate aux dossiers criminels qui identifient une personne d'intérêt spécial.
  3. Essayer de mieux comprendre les facteurs qui permettent l'acceptation de demandes de déclaration de DD et de délinquant purgeant une peine de longue durée. Les deux types de dispositions du Code criminel du Canada stipulent des critères différents d'admissibilité et exigent beaucoup de ressources pour prouver aux tribunaux le caractère approprié des déclarations. La mise en relief des facteurs qui peuvent nuire au traitement des demandes permettra peut-être d'accroître leur utilisation dans le cas des délinquants repérés.

Source

Pour plus de renseignements

James Bonta, Ph.D.
Recherche correctionnelle
Sécurité publique Canada
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Ottawa (Ontario)
K1A 0P8
Tél. : 613-991-2831
Fax : 613-990-8295
Courriel : Jim.Bonta@ps-sp.gc.ca

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